*Catherine PILLARD/PILLAT était-elle une amérindienne?

Il est très très improbable que Catherine PILLARD ait été une amérindienne. Sa signature ADN mitochondriale a été rapportée récemment chez des italiens de la région d’Agide, près de Trentino par COIA V. et al. (2012). Evidence of high genetic variation among linguistically diverse populations on a micro-geographic scale:  a case study of the Italian Alps. Journal of Human Genetics (2012) 57, 254–260.

Des signatures semblables, voire identiques,  à celle des descendants de Catherine PILLARD ont été signalées dans la littérature scientifique:

1 Han-Neimeng (Chifeng) individual (Wen et al. 2004; http://dx.doi.org/10.1038/nature02878)
1 Mansi individual (Derbeneva et al. 2002; http://dx.doi.org/10.1086/339524)
2 Nogay individ
uals (Bermisheva et al. 2004;  http://dx.doi.org/10.1023/B:MBIL.0000037003.28999.45)
2 Tatar (Kutarbitka) individuals (Naumova et al. 2009;  http://dx.doi.org/10.1134/S1022795409090129)
1 Tatar individual (Malyarchuk et al. 2010;  http://dx.doi.org/10.1093/molbev/msq065)
1 Afghani Hazara individual (Di Cristofaro et al. 2013;  http://dx.doi.org/10.1371/journal.pone.0076748)
1 Afghani Uzbek individual (Di Cristofaro et al. 2013;  
http://dx.doi.org/10.1371/journal.pone.0076748)
1 presumably Austrian individual (Mueller et al. 2009;  http://dx.doi.org/10.1371/journal.pone.0006370)
1 Italian (Alps) individual (Coia et al. 2012;  http://dx.doi.org/10.1038/jhg.2012.14)
1 presumably German individual (Lutz-Bonengel et al. 2008;   http://dx.doi.org/10.1007/s00414-007-0190-6)
1 cas A10, SSG_M15, Songshugou (SSG) Tacheng District. Chine,   Date: 4237-4087 BP,  Group NSSG_EMBA
WANG et al 2021. Ancient Xinjiang mitogenomes reveal intense admixture with high genetic diversity. Science Advances 31 Mar 2021: Vol. 7, no. 14, eabd6690  DOI: 10.1126/sciadv.abd6690

4 cas A10 (Od7 Od11, Krb10, Tk10) avec concordance parfaite sur HVR1 (C16223T A16227c C16290T T16311C G16319A) rapportés par
PILIPENKO et la 2015. MtDNA Haplogroup A10 Lineages in Bronze Age Samples Suggest That Ancient Autochthonous Human Groups Contributed to the Specificity of the Indigenous West Siberian Population. PLoS ONE 10(5): e0127182. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0127182

Leur conclusion:  « Par conséquent, l’haplogroupe A10 a toutes les caractéristiques attendues pour la composante indigène du pool génétique d’ADNmt des populations aborigènes de Sibérie occidentale. Il est fort probable que la Sibérie occidentale soit le lieu d’origine de l’A10 ou, en tout cas, le lieu de son évolution et de sa diversification à long terme; ainsi, l’haplogroupe d’ADNmt A10 pourrait être l’un des marqueurs génétiques de l’ancienne population autochtone qui a contribué aux premiers stades de la formation de la spécificité des populations indigènes de Sibérie occidentale, indépendamment de l’influence ultérieure de groupes génétiquement contrastés. »


Màj du 2021-avril-3

Voir aussi notre discussion sur le Forum généalogie.ADN sur FaceBook à http://on.fb.me/1vrDOR2

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La signature rCRS rencontrée chez les descendants utérins de Catherine PILLARD est la suivante:
A73G A235G A263G 315.1C C522- A523- C544T A663G A750G A1438G A1736G A2706G T4248C A4769G A4824G T5393C C7028T C7468T C8794T A8860G G9948A C10094T G11719A C12705T C14766T A15326G C16223T A16227c C16290T T16311C G16319A T16519C

Le chiffre encadré de deux lettres (e.g. A73G)  représente l’adresse ou le locus sur l’un des filaments d’ADN de la mitochondrie. Les mitochondries de la femme qui a fourni l’ADN-mt pour établir le système de référence appelé le Cambridge Reference Sequence (rCRS) comptait 16,569 paires de bases.
La lettre qui précède l’adresse du locus est la valeur que prend le référent rCRS. Dans le cas de la mutation A73G, la valeur du référent rCRS est A (Adenine). La lettre qui suit l’adresse du locus est la valeur trouvée chez la personne testée. Ainsi, au locus 73, le CRS présente une base A (Adénine) alors que les descendants de Catherine PILLARD possèdent une base G (Guanine). Il y a eu substitution de base.  Cette substitution de base de A à G constitue une variation depuis le référent rCRS. C’est considéré comme l’équivalent d’une mutation.  Et ainsi de suite pour chacune des variations depuis le rCRS notées lors d’un test portant sur les 16,568 paires de base que comprend cet ADN-mt. En effet, l’ADN-mt de Catherine PILLARD comprend une insertion à 315.1C et deux délétions C522- A523-, pour un total de 16,568 loci.

Cette signature contient aussi une variation en <transversion> très rare, la A16227c. C’est cette mutation qui permet au scientifique de classer l’haplotype qui la contient dans l’haplogroupe A10.
Les substitutions de bases se font entre bases complémentaires A-G (les bases purines) , C-T (les bases pyrimides). On parle de substitution de transition lorsqu’il y a substitution d’une base purique (A-G) à une autre base purique ou d’une base pyrimidique (C-T) à une autre base pyrimidique. Au contraire, une substitution par transversion est une mutation impliquant le remplacement d’une base purique (C-T) par une base pyrimidique (A-G) ou la converse, d’une base pyrimidique (A-G) par une base purique (C-T). Cela se produit très rarement. Or, dans l’ADN-mt des descendants utérins de Catherine PILLARD se trouve le transversion A16227c.

Nous savons par triangulation depuis l’ADN des descendants de Catherine PILLARD que cette dernière possédait déjà A16227c et que cette variation A16227c s’est transmise de génération en génération depuis jusqu’à nous. Or, nous le verrons plus loin, cette mutation était déjà présente en Asie occidentale bien avant Catherine PILLARD.
Pour rappel, les descendants utérins sont ceux et celles qui ont Catherine PILLARD dans leur lignée des mères, lignée aussi appelée matrilignage. La signature de l’ancêtre Catherine PILLARD est inférée par triangulation à partir des signatures de ceux et celles qui l’ont en matrilignage et à partir de leur ascendance en matrilignage qui les conduit jusqu’à cette mère fondatrice au Canada.

La signature triangulée se trouve à bit.ly/TRI-PillatCatherine

Selon la version documentaire des informations que nous avons sur Catherine PILLARD, elle serait née à Larochelle en France, aurait émigré au Canada en tant que Fille du Roi et aurait épousé Pierre Charron (dit Ducharme) à Montréal le 19 octobre 1665.

Une signature très semblable à celle de Catherine PILLARD a été décrite par Malyarchuk et al. (2010) Mitogenomic diversity in tatars from the volga-ural region of Russia. J. Mol. Biol. Evol., 27, 2220-2226.
Cette signature fut observée à 5 reprises chez des Tatars. Voir le tableau S1.

TabS1-Malyarchuk&al2010

La signature qui lui correspond a été inscrite au NCBI sous GU122995 le 16-OCT-2009 http://www.ncbi.nlm.nih.gov/nuccore/GU122995
Cette signature a été d’abord classée A8b par Malyarchuk et al. (2010).
Mannis van Oven et Kayser qui maintiennent la classification PhyloTree.org créèrent un sousclade A10 pour inclure cette signature. La version de PhyloTree de cette date 21-JUIN-2010 (BUILD-12, je crois) indiquait déjà que cet haplotype était A10. Or, jusque là, les haplotypes ADN-mt Amérindiens de souche qui appartenaient à l’haplogroupe majeur A étaient tous du sousclade A2 et en aval. Aucun n’appartenait à l’haplogroupe A10.

L’haplotype (signature type) de Catherine PILLARD a été inscrit à la base de données du NCBI (National Center for Biological Information) sous le numéro HM569228 (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/nuccore/HM569228) par B. GREENSPAN de la compagnie Family Tree DNA (Houston, Texas) le 21-JUIN-2010. Cette signature HM569228 a été immédiatement cataloguée sous l’haplogroupe A10, suivant en cela la classification phylogénétique établie et mise-à-jour par Mannis van Oven et Kayser à http://www.PhyloTree.org
L’haplotype CP rejoignait ainsi celui décrit par Malyarchuk et al. (2010) chez cinq Tatars de la tribu des Aznakevo et Buinsk mentionnés plus haut.

Fig8-Russia

Les deux signatures HM569228 et GU122995 montrent une corrélation nominale de 89% (89% des mutations de l’une sont présentes dans l’autre). Mais en réalité, si nous ne tenons pas compte des variations banales 16519C et 64T, ces deux signatures corrèlent à 98%. Elles sont si semblables qu’elles pourraient partager un ancêtre commun qui aurait vécu assez récemment.

Une signature A est enregistrée au projet Jewish DNA à FTDNA http://bit.ly/WBCF7B et elle possède le motif [A16227c T16311C] caractéristique du A10.

Il ne s’agit pas de l’haplotype Catherine Pillard. Il s’agit du kit #218426 dont le nom de famille est KHAVRUTSKII et dont l’ancêtre matrilinéaire relativement récent s’appelait SHUMSKY. Cette signature est indiquée comme originaire de Russie.  Cet haplotype contient les variations suivantes: 16223T 16227c 16230G 16290T 16311C 16319A.
À ce jour,  le séquençage complet de cette signature #218426 est à faire.
Sur la base des variations HVR1, elle ressemble énormément à l’haplotype GU122995 de MALYARCHUCK et al, (2010) trouvé chez les Tatars.

VYACHESLAV et al. (2012) Human migrations in the southern region of the West Siberian Plain during the Bronze Age: Archaeological, palaeogenetic and anthropological data. In: Kaiser, Elke / Burger, Joachim / Schier, Wolfram (2012) Population Dynamics in Prehistory and Early History. New Approaches Using Stable Isotopes and Genetics
DE GRUYTER pp 93-112. (pour l’article: http://bit.ly/WBzJrN)
Ces auteurs rapportent six cas d’ADN mitochondrial ancien étudiés sur le site archéologique de Sopka (Steppe de la forêt Baraba, site 4 sur l’illustration plus bas) en Russie Occidentale. Ces six cas appartiennent à l’haplogroupe A et possèdent la variation A16227c. Deux des six cas, le Ut5 et le Ut38 présentent en plus la variation 16311C comme l’haplotype des descendants utérins de Catherine PILLARD. La datation indique l’époque de l’âge du bronze pour la région (4-3 ka BC). Les variations de la région HVR1 trouvées pour ces deux cas sont: 16148T 16223T 16227C 16290T 16311C 16319A

Fig5-VYACHESLAV

Tab3-VYACHESLAV

L’haplotype Catherine PILLARD en HVR1 une fois couché dans le même format devient : 223T -227C -290T -311C -319A
La variation 16519C est très commune et n’a pas été testée par VYACHESLAV et al. (2012).
Sur ce tableau de VYACHESLAV et al. nous constatons que l’haplotype I des cas Kr10, TK3 et StsII est identique sur HVR-I à l’haplotype de Catherine PILLARD.

Aucun autre haplotype A10 [A16227C T16311C] n’a été découvert depuis 10 ans en Amérique du Nord, Centrale et du Sud, autre que celui des descendants utérins de Catherine PILLARD, ni même un A10 qui pourrait être amérindien ne serait-ce que de culture, et non nécessairement de souche fondatrice. En effet, rien n’exclut qu’un Amérindien soit découvert A10 par métissage eurasien.

Tous les haplotypes amérindiens qui continuent à être identifiés et qui appartiennent à l’haplogroupe majeur A, sont du sousclade A2 ou des sousclades de A2 comme A2a, A2f, &c.

La divergence entre les haplotypes A2 et A10 est très importante. Treize mutations significatives séparent les A2 des A10.

Ces évidences sont suffisantes pour nous convaincre que l’ADN mitochondrial des descendants utérins de Catherine PILLARD est d’origine eurasienne et non amérindienne fondatrice. La région au Nord de la mer Noire et de la mer Caspienne forme la steppe pontique à travers laquelle les migrations vers l’Europe ont été pratiquées lors du peuplement de l’Europe. De plus les Tatars ont envahi l’Europe à plusieurs reprises et les invasions et guerres se faisaient avec le support des femmes.
Il est possible aussi que les Vikings qui ont colonisés ces régions de la Russie aient vicarié la propagation de A10 en Europe occidentale lors de leur établissement en Normandie.   Pas étonnant que cet haplotype A10 se soit retrouvé dans la population française à l’époque du peuplement de la Nouvelle France.

Y-a-t-il d’autres A10 connus à travers le monde?

En fouillant la littérature scientifique pour me documenter sur l’haplotype de Catherine PILLARD j’ai découvert des A10, autres que les descendants utérins de Catherine PILLLARD, qui vivent ailleurs dans le monde, en Sibérie occidentale dans la province de Taymir.

FEDEROVA et al. (2013) Autosomal and uniparental portraits of the native populations of Sakha (Yakutia): implications for the peopling of Northeast Eurasia. BMC Evolutionary Biology, (2013) 13, 127- (1-18)

http://www.biomedcentral.com/1471-2148/13/127
http://www.biomedcentral.com/content/pdf/1471-2148-13-127.pdf

FEDEROVA et al. (2013) ne semblent pas avoir inscrits à GenBank les haplotypes qu’ils ont trouvés dans leur recherche.

Dans cette étude ces chercheurs ont, entre autre, décrit 701 haplotypes ADN-mt de cinq populations natives de Sakha (Yakuts, Evenks, Evens, Yukaghirs et des Dolgans).

La région étudiée est illustrée sur la figure suivante.

sakhamap

Trois cas de A10 ont été trouvés chez les Dolgan (sur la carte plus haut, les points 22, 23 et 24). Pour la classification des haplotypes de l’haplogroupe A voir leur Figure 1.

Federova&al2013F1partA

Ces haplotypes A10 ne sont pas encore enregistrés à GenBank. Il m’est donc impossible de les comparer à l’haplotype des descendants utérins de Catherine PILLARD.